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L’intégration à grande échelle des services d’aide, d’accompagnement et de soin


Sur tout le territoire, la pluralité des services d’aide, d’accompagnement et de soin ainsi que la diversité des bénéficiaires (personnes âgées, handicapées, atteintes de pathologie chroniques limitant l’autonomie, etc.) sont à l’origine de véritables parcours du combattant. La majorité des personnes concernées ne bénéficient pas d’un accès simple, rapide et coordonné à l’ensemble des services dont elles peuvent avoir besoin quand les effets de l’âge, du handicap ou de la maladie se font sentir avec une certaine acuité. Or ces services sont indispensables non seulement à la vie à domicile et à la qualité de vie, mais également à la soutenabilité des politiques publiques concernées, dans le domaine de la santé et dans le domaine de la solidarité. Pour remédier à cela, la solution est connue depuis longtemps. Il s’agit de l’intégration des services : intégrer l’ensemble des guichets d’accueil physique, téléphonique et web des opérateurs parties prenantes dans une logique commune d’accueil, d’identification du besoin, d’orientation vers les services adéquats, et pour les cas les plus complexes, de coordination renforcée.


Le difficile passage à l’échelle des expérimentations et ses principales raisons


Cependant, la mise en place de cette solution se heurte à une difficulté de taille : celle du « passage à l’échelle ». En effet, la majorité des projets d’intégration de services ont du mal à dépasser le stade de l’expérimentation (programmes « nationaux » PAERPA, MAIA, PRADO ; multitude d’initiatives locales*). La généralisation est extrêmement difficile car elle nécessite de faire coopérer à la fois différentes administrations et différents opérateurs de services, publics et privés, dans un contexte de fort cloisonnement, tout en préservant (a minima ?) l’égalité de traitement : les pauvres comme les riches, les ruraux comme les citadins. Et elle bute souvent sur l’insuffisance des études d’impact socio-économique des expérimentations (à l’exception notable de PRADO, pour une partie des publics concernés par le programme).


De l’espoir pourtant


Si ce passage à l’échelle semble être un objectif ambitieux, il n’en est pas moins atteignable. C’est en tout cas l’espoir réaliste que suscite la réussite de plusieurs projets d’intégration de services dans d’autres secteurs, comme en témoignent les exemples suivants. Dans le secteur de l’assurance : IMA, Europ Assistance, AXA Assistance, Mondial Assistance. Dans le secteur de la rénovation de l’habitat : certaines plateformes locales de rénovation énergétique. Et dans le champ des solidarités, l’intérêt croissant d’acteurs de poids est susceptible d’accélérer le mouvement, comme on le voit notamment avec les initiatives du Groupe La Poste et du Groupe SOS. Ainsi La Poste a pris la majorité du capital du réseau de services à domicile Axeo Services, après avoir lancé successivement un service de visite des séniors par les facteurs, un service de portage de médicaments, et un service autour des tablettes numériques Ardoiz. De son côté, le groupe SOS, première entreprise sociale européenne (15 000 salariés répartis dans plusieurs centaines d’établissements et services), propose des solutions innovantes d’intégration de services dans les secteurs de la jeunesse, de l’emploi, de la vie rurale et désormais, du soutien à domicile avec l’offre Seniors Connect.


Comment se font les passages à l’échelle des innovations technologiques et servicielles ?


On retiendra, pour le domaine qui nous intéresse, deux modes de diffusion des innovations technologiques et servicielles. Premier mode : des gros équipements vers les plus petits. Prenons le cas des horloges. Elles sont apparues dans les châteaux, puis sur les clochers de chaque église, puis dans les maisons, puis au poignet de chacun. Aujourd’hui, chaque individu à plusieurs moyens de lecture de l’heure. On transpose sans peine dans le domaine qui nous intéresse : équipement des établissements (hôpitaux, EHPAD), puis des résidences Autonomie, puis du parc locatif des bailleurs sociaux, avant de terminer par le logement individuel. Deuxième mode : des plus riches vers tout le monde. Ainsi, les téléphones mobiles ont d’abord équipé les directions générales, puis les commerciaux, puis toute la population. Appliqué à notre domaine : une prestation de base à faible coût, accessible à tous (le cas échéant avec l’aide financière de la collectivité), et à côté de cette prestation de base, des prestations à plus forte valeur ajoutée, sans financement public, pour ceux qui en ont les moyens, en attendant que la croissance des volumes fasse baisser les prix. Dans un cas comme dans l’autre, la loi du marché est à l’œuvre.


Quels accélérateurs une collectivité peut-elle actionner lorsque la loi du marché ne suffit pas ?


A la différence des montres et des téléphones mobiles, l’évolution des dispositifs d’intégration de services pour le soutien à domicile ne répond pas à la seule loi du marché – où l’adéquation de l’offre et de la demande suffit à assurer le passage à l’échelle. Et si la loi du marché ne suffit pas pour assurer le déploiement à grande échelle des plateformes d’intégration de services dans le champ de l’autonomie, quels accélérateurs faut-il alors actionner ? Nous en identifions cinq.

La réussite d’un projet dont l’ambition est la coordination de plusieurs services nécessite en premier lieu la construction d’un socle commun : cette étape « socle » du projet consiste dans la modélisation des besoins, des services et de leur intégration, du système d’information sous-jacent (dont les composants logiciels doivent interopérer), de l’économie du dispositif, et de la gouvernance. Le deuxième facteur de succès est l’élaboration d’une stratégie de mobilisation des acteurs du territoire. La participation de l’ensemble des partenaires dès la phase d’élaboration et de conception d’une plateforme de services est indispensable pour être en mesure d’apporter une réponse coordonnée aux besoins du bénéficiaire. Il convient ensuite d’exploiter au maximum les possibilités offertes par les évolutions législatives récentes et à venir prochainement. En particulier, les lois portant sur la nouvelle organisation territoriale, la modernisation de notre système de santé et l’adaptation de la société au vieillissement doivent être prises en compte. De même, les prochaines lois annoncées : « Grand âge et Autonomie », loi « 3 D ». Par-delà leurs enjeux propres, ces évolutions législatives ont en commun d’accroitre le potentiel d’action des acteurs publics dans les territoires. Enfin, le renforcement des partenariats public/privé et l’innovation dans les formes de financement peuvent constituer des leviers de croissance fort efficaces.

* Comme par exemple Boost’ages : un projet exemplaire de la CC du Warndt, sur la question des personnes âgées isolées (exemplaire notamment dans le décloisonnement et le travail en réseau entre 1 EPCI, 5 communes et CCAS, 1 SAAD, 1 pilote MAIA, 1 foyer-logements).

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